Evaluation du potentiel et suivi de la performance des systèmes géothermiques de minime importance (0-200m) sous le Grand Paris (THERMOPARIS)

La tâche « Evaluation du potentiel et suivi de la performance des systèmes géothermiques de minime importance (0-200m) sous le Grand Paris (THERMOPARIS)», est une des quatorze tâches du projet ciblé n°10 (PC10) S-PASS « Bassin Parisien – Ressources et usages du Sous-Sol urbain » https://www.soussol-bien-commun.fr/fr/s-pass-bassin-parisien-ressources-usages-du-sous-sol-urbain, du Programme d’Équipement Pluriannuel de Recherche (PEPR) « Sous-sol », financé par le France 2030. Coordonnée par l’Université Paris-Saclay, cette tâche rassemble également des chercheurs du BRGM et de l’Université de Strasbourg.

Les ressources géothermiques disponibles à faible profondeur sous les villes (<200 m), dite géothermie de minime importance selon la loi française, suscitent un intérêt croissant. En effet, le potentiel sous le Grand Paris a récemment été évalué comme étant énorme par le BRGM (Maragna et al., 2022). L’Ile-de-France est déjà la région du monde qui concentre le plus d’unités de production de chaleur extraite par la géothermie profonde (essentiellement Dogger), mais cette ressource est adaptée à de gros réseaux de distribution pour des habitats collectifs, non adaptée pour des quartiers ou zones beaucoup moins denses, plus récentes, ce qui concerne beaucoup de bâtiments. Le développement de la géothermie de surface, qui en plus d’extraire de la chaleur, permet de fournir également du froid (geocooling), est donc un enjeu crucial récemment souligné par le Haut-Commissariat au Plan (Bayrou, 2022). Ce développement semble indispensable pour que les zones urbaines atteignent une neutralité carbone en termes de chauffage et de refroidissement des bâtiments.

Les systèmes pour extraire la chaleur sont de deux grands types (1) systèmes en boucle ouverte exploitant des eaux souterraines (en général doublet) et (2) systèmes en boucle fermée, principalement des sondes géothermiques verticales (en milieu aquifère ou non aquifère). La problématique du type d’installation se pose dans beaucoup de métropoles, et des travaux ont été menés pour quantifier le potentiel de la géothermie de surface. Ces travaux reposent sur le développement et la calibration de modèles numériques hydrogéologiques et thermiques (souvent dans le logiciel Feflow), par exemple à Saragosse (García-Gil et al., 2015), Lyon (Attard, Rossier and Eisenlohr, 2016, 2017; Attard, Rossier, et al., 2016; Attard, Winiarski, et al., 2016), Bâle (Mueller, Huggenberger and Epting, 2018), ou Turin avec une attention particulière aux structures souterraines anthropiques (tunnels de métro…) (Barla, Di Donna and Perino, 2016; Barla and Insana, 2023). Des tentatives d’extrapolation de ces résultats numériques de l’échelle du quartier à l’échelle de la métropole ont été menées (Epting et al., 2017, 2018, 2020). Cependant il n’existe pas vraiment de procédure pour évaluer la soutenabilité de l’extraction d’une zone ou d’un quartier ou îlot d’habitation donné. La question scientifique du projet est : jusqu’à quel taux d’exploitation (nombre de systèmes géothermiques) pouvons-nous mettre en place sur un périmètre donné sous le Grand Paris ?

L’expérience acquise sur l’extraction de chaleur en géothermie profonde peut être reproduite avec les systèmes en boucle ouverte en couplant sédimentologie, pétrophysique, altération diagénétique et modélisation thermo-hydro-dynamique, où les effets d’interaction entre doublets peuvent être pris en compte. En effet, de nombreux codes ayant fait leur preuve (TOUGH3, ECLISPE, MARTHE, COMPASS, FEFLOW…) existent (1) pour prédire l’extraction de chaleur sous forte contrainte (avec de nombreux doublets) et (2) pour prédire leur durabilité dans ce type de système ouvert (par doublet). En revanche, beaucoup moins de travaux ont été menés sur la Métropole du Grand Paris sur la géothermie de surface, ce qui complique la prédiction de l’évolution thermique du milieu et de l’énergie disponible pour les habitations sur plusieurs décennies (voir plus), en prenant en compte (1) l’interaction entre différents systèmes d’exploitation (ouvert et fermé), (2) ou différents ouvrages dans différents niveaux, (3) l’utilisation de normes de performance technique ou encore (4) la compétition entre les systèmes et (5) évaluer un usage conflictuel de la géothermie sur d’autres usages du sous-sol.

Afin de répondre à ces besoins, les deux objectifs majeurs de la tâche seront de fournir:

  1. Un méthodologie de modélisation du potentiel géothermique (et utilisable de manière soutenable) de minime importance à l’échelle d’un quartier dans la zone du Grand Paris, allant jusqu’à 200 m de profondeur, et/ou comprenant la craie, et en évaluant son évolution temporelle.
  2. Des nouveaux capteurs géophysiques peu invasifs, permanents et adaptés aux milieux souterrains du Grand Paris permettant d’observer sur le long terme (10-20 ans) l’évolution du régime thermique du sous-sol au voisinage des ouvrages géothermiques

Exemple d’utilisation de chaleur ou froid en milieu urbain. En géothermie profonde, la chaleur est exploitée par un doublet, alimentant un réseau de chaleur urbain collectif. En géothermie de surface, une pompe à chaleur (PAC) exploite l’énergie du sous-sol avec des sondes ou des doublets sur nappe pour chauffer les bâtiments en hiver. Cette PAC peut être réversible, utilisée en mode climatisation l’été, ou encore en pause. En l’absence de PAC, les sondes peuvent rafraîchir les bâtiments par géocooling. Benjamin Brigaud, Fourni par l’auteur

 

Références

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Attard, G., Winiarski, T., et al., 2016. Revue: Impact des structures du sous-sol sur les écoulements des eaux souterraines en milieu urbain’, Hydrogeology Journal, 24(1), pp. 5–19. https://doi.org/10.1007/s10040-015-1317-3

Attard, G., Rossier, Y. and Eisenlohr, L., 2016. Urban groundwater age modeling under unconfined condition – Impact of underground structures on groundwater age: Evidence of a piston effect’, Journal of Hydrology, 535, pp. 652–661. https://doi.org/10.1016/j.jhydrol.2016.02.034

Attard, G., Rossier, Y. and Eisenlohr, L., 2017. Underground structures increasing the intrinsic vulnerability of urban groundwater: Sensitivity analysis and development of an empirical law based on a groundwater age modelling approach’, Journal of Hydrology, 552, pp. 460–473. https://doi.org/10.1016/j.jhydrol.2017.07.013

Barla, M., Di Donna, A. and Perino, A., 2016. Application of energy tunnels to an urban environment’, Geothermics, 61, pp. 104–113. https://doi.org/10.1016/j.geothermics.2016.01.014

Barla, M. and Insana, A., 2023. Energy tunnels as an opportunity for sustainable development of urban areas’, Tunnelling and Underground Space Technology, 132, p. 104902.: https://doi.org/10.1016/j.tust.2022.104902.

Bayrou, F., 2022. la géothermie de surface : une arme puissante (No. Ouverture N° 12). Haut‐Commissariat au Plan.

Epting, J. et al., 2017. Development of concepts for the management of thermal resources in urban areas – Assessment of transferability from the Basel (Switzerland) and Zaragoza (Spain) case studies’, Journal of Hydrology, 548, pp. 697–715. https://doi.org/10.1016/j.jhydrol.2017.03.057

Brigaud, B., 2023. La géothermie, enjeu majeur pour la neutralité carbone des zones urbaines, The Conversation https://theconversation.com/la-geothermie-enjeu-majeur-pour-la-neutralite-carbone-des-zones-urbaines-207994

Epting, J. et al., 2018. Relating groundwater heat-potential to city-scale heat-demand: A theoretical consideration for urban groundwater resource management’, Applied Energy, 228(June), pp. 1499–1505. https://doi.org/10.1016/j.apenergy.2018.06.154

Epting, J. et al., 2020. City-scale solutions for the energy use of shallow urban subsurface resources – Bridging the gap between theoretical and technical potentials’, Renewable Energy, 147, 751-763 https://doi.org/10.1016/j.renene.2019.09.021

García-Gil, A. et al., 2015. Recovery of energetically overexploited urban aquifers using surface water’, Journal of Hydrology, 531, pp. 602–611. https://doi.org/10.1016/j.jhydrol.2015.10.067.

Maragna, C., Les Landes Antoine, A., Durst, P., Dupaigne, T., 2022. Cartographie du potentiel de la géothermie de surface sur le territoire de la Métropole du Grand Paris (Rapport final V2 No. BRGM/RP-71139-FR). https://infoterre.brgm.fr/rapports//RP-71139-FR.pdf

Mueller, M.H., Huggenberger, P. and Epting, J., 2018. Combining monitoring and modelling tools as a basis for city-scale concepts for a sustainable thermal management of urban groundwater resources’, Science of the Total Environment, 627, pp. 1121–1136. https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2018.01.250

 

Porteur : Benjamin Brigaud et Frédéric Dubois (BRGM)

Source de financement : Projet ciblé n°10 (PC10) S-PASS « Bassin Parisien – Ressources et usages du Sous-Sol urbain » https://www.soussol-bien-commun.fr/fr/s-pass-bassin-parisien-ressources-usages-du-sous-sol-urbain, du Programme d’Équipement Pluriannuel de Recherche (PEPR) « Sous-sol », financé par le France 2030

Personnels impliqués à GEOPS

Benjamin Brigaud, Pascal Sailhac, Marc Pessel, Cédric Bailly, Emmanuel Léger, Hermann Zeyen

Collaboration avec : BRGM, Cergy Paris Université et Université de Strasbourg (ITES/EOST)