Le 8 décembre 2014 : QUENET Mélanie : "Rôle des eaux souterraines dans l’hydrologie d’un bassin versant glaciaire sous condition de pergélisol continu au Spitsberg (Austre Lovénbreen, 79°N) - Approches hydrodynamiques et géochimiques".
Membres du jury :
Prof. Christelle Marlin : Directrice de thèse (Université Paris Sud).
Prof. Ian D. Clark : Rapporteur (Université d’Ottawa).
Prof. Jérôme Viers : Rapporteur (Université Paul Sabatier).
Dr. François Costard : Examinateur (CNRS, Université Paris Sud).
Dr. Madeleine Griselin : Examinateur (CNRS émérite, Université de Franche-Comté).
Dr. Corinne Le Gal La Salle : Examinateur (Université de Nîmes).
Dr. Valérie Masson-Delmotte : Examinateur (Ingénieur-chercheur CEA, LSCE).
Prof. Pierre Ribstein : Examinateur (Université Pierre et Marie Curie).
Résumé : L’hydrologie, la géochimie et la météorologie du petit bassin versant glaciaire à pergélisol continu du glacier Austre Lovén (10 km2, Spitsberg occidental, 79°N) ont été étudiées au cours des trois années hydrologiques 2010, 2011 et 2012 en vue de mieux définir le rôle des eaux souterraines de la nappe supra-pergélisol dans les flux d’eau et de solutés en sortie de bassin. Le travail de thèse a montré que la période d’écoulement survient en moyenne sur une période de 141 jours (σ = 4,5 jours) comprise entre les 9-10 mai et 26-27 octobre. La lame d’eau moyenne est de 0,940 m.a-1 (σ = 0,156 m.a-1) et se répartie à 79 % en eau de fonte (54 % de fonte de neige et de glace sur le glacier, 18 % de neige sur les versants et 7 % de neige dans la zone proglaciaire), 18 % en hauteurs de précipitation efficace et 3 % en décharge sous-glaciaire pérenne. Les incertitudes sur la quantification des composantes de l’écoulement et de la lame d’eau écoulée elle-même ne permettent pas une quantification plus précise des flux en eau de la nappe supra-pergélisol. Cette étude montrerait donc qu’en termes de flux d’eau, la composante d’eau souterraine supra-pergélisol pourrait être négligeable et ne constituer qu’un réservoir de transit de l’eau. En effet, le suivi piézométrique montre que la nappe dégèle et regèle à des profondeurs similaires malgré la présence d’épisodes de recharge. Ces recharges qui surviennent majoritairement au profit d’épisodes pluvieux importants (hauteurs cumulées sur 2 à 8 jours supérieures à 20 mm) se déchargent lentement par une alimentation de la rivière par la nappe. Les suivis thermiques du sous-sol ont enfin permis d’établir que le toit du pergélisol supposé se situe à une profondeur de 2,50 m pour une puissance de nappe pouvant atteindre plus d’1,70 m, soit 70 % de la couche active. Par ailleurs, les données thermiques montrent des températures du sous-sol à moins de 0,5°C de la température de dégel, laissant supposer une dégradation prochaine du pergélisol avec par conséquent un accroissement de l’épaisseur de l’aquifère de la nappe supra-pergélisol (couche active). Les données de géochimie montrent une augmentation de la minéralisation des eaux de surface du bassin par des contributions d’eau souterraine le long des cours d’eau, preuve que les eaux de la nappe supra-pergélisol impactent les flux de solutés aux exutoires. Les analyses en chimie élémentaire (n = 178) conduites sur les différents composants du système hydrologique montrent que les eaux du bassin possèdent un faciès sulfaté-bicarbonaté calcique à bicarbonaté-sulfaté calcique lié à l’altération des carbonates et des sulfures des moraines récentes et dans l’altération d’aluminosilicates dans les moraines plus anciennes. Les données d’isotopie du strontium (87Sr/86Sr ; n = 8) corroborent un apport du calcium dissous par les aluminosilicates de par leur signature radiogénique. Les teneurs en 13C du CID des eaux (n = 30) sont cohérentes aussi bien avec un système ouvert sur le CO2 du sol (à -20 ‰) et le CO2 atmosphérique (entre -6,5 et -8 ‰) qu’avec un système fermé sur le CO2 où la signature de δ13C des carbonates marins (à 0 ‰) peut s’imposer par dissolution. Les données d’isotopie de la molécule d’eau (n = 592) ont permis d’identifier les signatures des différentes familles d’eau composant l’hydrosystème et de proposer un modèle de mélange entre 4 pôles expliquant les signatures des eaux aux exutoires du bassin versant : eaux de fonte, précipitations estivales, eaux sous-glaciaires et eaux de la nappe supra-pergélisol. Le couplage entre les teneurs en 18O et SO42- des eaux aux exutoires confirme ce modèle de mélange, le renforçant même en termes de variations temporelles. La mesure de 3H-3He tendrait vers un temps de séjour court tandis que les premières mesures d’activité 14C (n = 15) sont faibles, renseignant une minéralisation des eaux par un carbone ancien.